Vortex et Instabilités

 

Rapid fusion stage of two co-rotating vortices at Re=50000 (from C. Josserand and M. Rossi, EJMB (2007)).

Pierre Carlès

Christophe Josserand

Pierre-Yves Lagrée

Maurice Rossi

Stéphane Zaleski

 

 

 

 

 



La notion d'instabilité est centrale en mécanique des fluides, la plupart des écoulements étant organisés en structures de vorticité (nappes ou tourbillons) provenant ou susceptibles de déstabilisations. Ainsi les instabilités de couche de mélange engendrent-elles des tourbillons. Ces derniers sont parfois eux-mêmes instables, produisant de petites échelles dans l'écoulement. De nombreux mécanismes sont susceptibles de produire des instabilités aux interfaces fluide-fluide.


M. Rossi développe des travaux concernant la dynamique des tourbillons isolés (jet tourbillonnaire ou instabilité elliptique). Par exemple, une étude par simulation directe d'un jet tourbillonnaire a mis en évidence des scénari très différents suivant l'intensité de la rotation du jet. Cette thématique sera poursuivie avec Ivan Delbende du LIMSI, (e.g. évaluation de la dissipation et du taux de transfert de l'énergie vers les petites échelles effectués en parallèle avec des expérimentateurs) et approfondie (e.g. dynamique des vortex écrantés ou de vortex soumis à une rotation superposés).


L'interaction de deux tourbillons est également un problème important pour comprendre la dynamique de certains écoulements (instabilités ou fusion des tourbillons de sillage en aéronautique) et pour extraire les mécanismes élémentaires qui sous-tendent la dynamique des écoulements turbulents. Dans le cadre bidimensionnel, Ch. Josserand et M. Rossi ont décrit la fusion de deux tourbillons co-rotatifs en montrant les différentes étapes qui la caractérisent. Par un code numérique dédié à l'étude d'écoulements à symétrie hélicoïdale, M. Rossi (avec I. Delbende) se propose d'analyser les effets tridimensionnels sur cette fusion liés par exemple à la courbure ou à l'influence d'une composante axiale de vitesse. Par ailleurs, M. Rossi (avec I. Delbende) étudie par simulation numérique directe tridimensionnelle la saturation nonlinéaire de l'instabilité elliptique de deux vortex contrarotatifs et son effet sur l'instabilité à plus grande longueur d'onde dite instabilité de Crow.

P. Carlès et Ch. Josserand développent une activité autour des instabilités gravitationnelles d'interfaces. Issue d'une réflexion initiale centrée sur le problème des impacts de liquide, cette activité s'est peu à peu orientée spécifiquement vers l'étude des instabilités de Rayleigh- Taylor (RT), Richtmyer-Meshkov (RM).


Ch. Josserand et L. Duchemin se sont intéressés à la dynamique asymptotique en aiguille apparaissant dans la limite d'un rapport de densité infini et en écoulement potentiel pour RT et RM. Une approche locale du champ de vitesse autour de l'aiguille permet de prédire une croissance de la courbure de l'aiguille comme la puissance cubique du temps ainsi qu'une décroissance de la correction à l'accélération. Il est remarquable de trouver ces lois d'échelles similaires pour les deux instabilités alors que l'écoulement présente des propriétés locales différentes. À l'aide d'une étude numérique détaillée d'intégrales de frontières alliant raffinement de maillage et transformation conforme, Ch. Josserand et L. Duchemin ont pu montrer que ces lois d'échelles étaient satisfaites, la correction à l'accélération étant vérifiée sans paramètre ajustable dans la théorie.


Le travail de P. Carlès s'est concentré sur l'étude des effets dissipatifs (viscosité, miscibilité) et non linéaires sur la déformation d'interface dans ces instabilités. Le résultat principal de cette démarche a été la proposition du premier modèle quantitatif de l'instabilité RM entre deux fluides visqueux, modèle construit à l'aide de la rencontre des techniques de l'analyse de stabilité faiblement non linéaire et de l'analyse asymptotique. Ce modèle a été confronté avec succès à des simulations numériques diphasiques réalisées au LMM. Au-delà de ce premier résultat, le travail se développe actuellement vers la généralisation de ce modèle à des lois d'accélérations plus complexes que pour RM, et à la prise en compte d'autres sources de dissipation (comme la miscibilité des fluides par exemple). Cette approche se double depuis un an d'une activité expérimentale, développée en collaboration avec l'Université Case Western Reserve de Cleveland (USA). Sur une proposition initiale de l'équipe du LMM, nous avons développé dans ce laboratoire partenaire une expérience de RT sous lévitation magnétique. L'objectif de cette opération est d'utiliser la gravité artificielle créée par la force magnétique pour : (i) maîtriser parfaitement les conditions initiales dans des expériences de RT classiques ; (ii) pouvoir moduler dans le temps la gravité apparente afin de réaliser des expériences de RT à gravité variable (dont RM). Nous avons déjà obtenu une série de résultats intéressants sur le problème modèle de RT en cellule de Hele-Shaw, instabilité pour laquelle un modèle original a été développé et confronté avec succès aux mesures.
Enfin, nous décrivons ci dessous diverses activités autour des instabilités de couche de mélange.


En collaboration avec le LAM (C. Ségoufin et B Fabre), P.Y. Lagrée a comparé des expériences faites à Eindhoven sur l'écoulement sortant d'une embouchure de flûte (canal+ jet) avec des calculs numériques. Ces calculs consistaient en une comparaison de FLUENT, Castem 2000 des équations de couche limite. Une théorie de perturbation du jet a ensuite été développée sur l'écoulement de base déterminé par le calcul numérique.
En collaboration avec Th. Boeck et D. Krasnov de l'université d’Ilmenau (Allemagne), M. Rossi démarre actuellement des travaux sur les instabilités d'un fluide conducteur en présence d 'un champ magnétique. Il s'agit pour l'instant d'un écoulement de Hartmann (écoulement dans un canal plan avec un champ magnétique). Cette étude d'instabilité linéaire se concentre sur la notion de croissance transitoire: on détermine par une méthode adjointe la perturbation capable de fournir le taux d 'amplification optimal dans une région des paramètres qui est asymptotiquement stable. On sait que de telles perturbations sont pertinentes dans des écoulements de type couche limite et que leur structure correspond à celle de vortex longitudinaux. On a montré que le champ magnétique est capable de modifier le caractère longitudinal des pertubations optimales.


Th. Boeck, Ph. Yecko, M. Rossi et S. Zaleski ont collaboré au problème du développement temporel et spatial des instabilités de couche de mélange diphasique en lien avec les mécanismes de l’atomisation. L’accord avec les expériences a pu être obtenu pour la première fois grâce à la prise en compte des termes visqueux. Des comparaisons récentes ont été menées avec les expériences de Cartellier à Grenoble.